L’histoire de la GLFR Dans de nombreuses cultures, nous connaissons, depuis les temps anciens, d’approches à l’initiation chez les femmes. Nous avons des preuves de la présence de femmes dans les guildes de bâtisseurs, qui ont servi de modèle à la Grande Loge de Londres créée en 1717.

Des femmes ont été enregistrées aussi dans les Guildes de Durham et Carnavon en Grande-Bretagne, en 1337. L’existence de femmes est attestée dans les corporations médiévales de bâtisseurs à Paris en 1292, à Chester en 1327, à York en 1350, à Norwich en 1375 ou à Wurzbourg entre 1428 et 1524. Le cas de la sculptrice Sabine Steinbach, fille du maître bâtisseur des cathédrales de Strasbourg et Marburg, est ainsi très connu.

Au 18ème siècle, certaines femmes de la haute société étaient membres de sociétés dites “secrètes” qui, cependant, n’appartenaient pas à la Franc-maçonnerie. Par contre, certaines étaient admises dans des loges dites d’adoption, créées tout spécialement pour elles, dans le cadre des loges masculines.

Elisabeth Adworth a été l’une des premières femmes initiées à la loge anglaise, en 1713. En 1744, l’ordre “du Bonheur” a accepté les femmes dans les loges maçonniques et cette habitude s’est répandue. Le Grand Orient de France leur a accordé un statut spécial en juin 1774, en créant, pour elles, des loges, dites “d’adoption”, réservées en fait aux épouses, filles ou autres femmes proches des francs-maçons et placées sous la tutelle et la direction des hommes. Les femmes avaient droit à une cérémonie d’adoption, pouvaient organiser des réunions de bienfaisance et engager des discussions intellectuelles sous l’égide des hommes. La duchesse de Bourbon, fille de Louis-Philippe de Bourbon, Grand Maître du Grand Orient, est la fondatrice de la loge Saint Jean de la Candeur, loge dans laquelle a été initiée la princesse de Lamballe, qui deviendra, le 18 janvier 1780, Grande Maîtresse des Loges Ecossaises Féminines Régulières de France. Cette loge pratiquait le Rite Ecossais Philosophique.

Durant la révolution française, la Franc-maçonnerie, sous toutes ses formes, va disparaître: elle ne réapparaîtra qu’avec l’Empire. Durant le XIXème siècle, de nombreux débats sur les droits des femmes ont engendré une vraie révolution dans l’ordre franc-maçon: “l’initiation d’une femme selon les mêmes rites et donnant les mêmes droits qu’aux hommes”.

Le 14 janvier 1882, Maria Deraismes, femme de lettres renommée et féministe, est initiée par Georges Martin, le président de la loge des “Libres -Penseurs” du Pecq. Onze ans après, elle créera, avec lui, l’ordre maçonnique mixte international “le Droit Humain”.
Cet ordre, qui proclame l’égalité des droits entre les deux sexes, se répand rapidement dans une cinquantaine de pays, donnant ainsi naissance à des polémiques qui ont encore cours aujourd’hui.

La création de loges maçonniques, dans lesquelles il était devenu possible pour les femmes et les hommes de travailler ensemble, a provoqué un véritable séisme dans les rangs des obédiences maçonniques de l’époque. Le 25 mai 1901, s’allume à Paris, la loge d’adoption n°1, “le Libre Examen”, suivie par la loge n°2, “la Nouvelle Jérusalem” et, dans la période suivante, s’allument 9 autres loges de ce style à Paris et dans d’autres villes.

A la veille de la deuxième guerre mondiale, les loges d’adoption, tout en dépendant administrativement de l’obédience masculine, bénéficient déjà d’une très grande autonomie et comptent, dans leurs rangs, des femmes d’exception. En 1935, le Convent de la Grande Loge de France décide de dissoudre les loges d’adoption. Les événements de 1940 vont éloigner la Franc-maçonnerie de la carte de l’Europe. Malgré cela, en 1945, lorsque les femmes obtiennent le droit de vote en France, les 4 loges féminines parviennent avec difficulté à se regrouper et vont recevoir, de leurs Frères de la Grande Loge de France, une autonomie définitive, ceci, à l’occasion du Convent du 17 septembre 1945. C’est ainsi que sera créée, le 21 octobre 1945, l’Union Maçonnique Féminine de France qui, en 1952, changera de nom pour s’appeler désormais Grande Loge Féminine de France. Elle adoptera, en 1957, de façon unitaire, le Rite Ecossais Ancien et Accepté.

Des femmes d’exception ont permis de maintenir la Franc-maçonnerie féminine à un niveau très élevé dans le monde. Parmi celles-ci, peuvent être mentionnées :
- Joséphine de Beauharnais, épouse de Napoléon Bonaparte et impératrice de France entre 1804 et 1809;
- Marie-Thérèse - Louise d’Orléans, princesse de Lamballe;
- les femmes de lettres Georges Sand et Maria Deraismes qui ont milité pour améliorer la condition des femmes
  en leur offrant une éducation meilleure dans le cadre de l’école laïque;
- la célèbre Alexandra David-Néel;
- Clara Barton, fondatrice de la Croix-Rouge américaine en 1877;
- l’aviatrice Edith Clark;
- Joséphine Baker;
- en Espagne, Belen Sarraga, très active dans la promotion du féminisme à l’intérieur de la Franc-maçonnerie;
- Anjelez Lopez de Ayala, née à Séville en 1858;
- Clara Campoamorcare qui obtient, le 1er octobre 1931, au parlement, le droit de vote des femmes,
  droit qui sera inscrit dans la Constitution espagnole de 1931;
- Edith Cowan, la première femme élue au Parlement australien;
- Ginette Eboué, représentante de la république du Congo à l’UNESCO;
- et, non des moindres, Golda Meir, premier ministre d’Israêl;
- Simone Veil, qui va se battre pour faire adopter une loi permettant aux femmes de disposer librement de leur corps;
- Margaret Thatcher, première femme en Europe et quatrième au monde à devenir chef de gouvernement,
  unique premier ministre britannique à être réélu trois fois consécutivement.

Ainsi, nous pouvons affirmer que de nombreuses femmes ont fortement marqué les domaines spirituel, social, intellectuel et politique.

La Roumanie n’échappe pas à la règle. En 1883, le Grand Maître en exercice de la Grande Loge Nationale, Constantin Moroiu, va initier ses deux filles à la loge “l’Etoile du Sud” à l’Orient Mangalia. C’est le début de la maçonnerie d’adoption en Roumanie.

Le 6 octobre 1888, sous l’obédience de la Grande Loge Symbolique de Hongrie, s’établit, à Arad, la loge, appelée “Concordia”. Dès le début, les idéaux maçonniques ont été promus. La loge d’Arad a assumé une série d’activités caritatives qui, dans les années qui ont suivi, se sont diversifiées et ont été fortement renforcées par la création d’une loge d’adoption, “la Fondation Féminine de Bienfaisance”. La loge “Concordia” a décidé que les fonds de la Fondation Féminine de Bienfaisance seraient utilisés à la construction d’un orphelinat moderne où les enfants pourraient vivre dans des conditions optimales. Les actions philanthropiques de la loge “Concordia” se sont poursuivies avec l’ouverture d’une cantine pour les pauvres d’Arad. La direction de celle-ci est revenue aux femmes, membres de la loge d’adoption contrôlée par les Maçonnes de la loge “Concordia”. En 1897, la préoccupation majeure des frères des loges d’Arad a été de créer une loge féminine dans la ville de Lipova.

En partant du désir de construire une société dans laquelle l’Homme doit représenter la valeur suprême, les loges d’Arad ont encouragé, au sein de la communauté profane, une attitude progressiste, un nouvel axe de réflexion et d’action. A travers leurs actions d’intérêt général en corrélation avec les impératifs du temps et, surtout, en stimulant et en solidifiant les initiatives des organisations non-gouvernementales, les loges d’Arad ont constitué un véritable moteur de la société civile.

En 1922, le Grand Maître de la Grande Loge Nationale de Roumanie, le colonel Ioan T. Ulic, a accordé une totale autonomie aux loges féminines d’adoption et a fondé, le 1er mars 1922, la Grande Loge Féminine d’Adoption Indépendante. Cette initiative s’est avérée plus que nécessaire, car la Grande Loge Nationale de Roumanie allait demander à la Grande Loge Unie d’Angleterre sa reconnaissance, or celle-ci n’acceptait pas la coopération maçonnique mixte et considérait la mixité comme une violation des Constitutions d’Anderson. L’initiative du colonel Ioan T. Ulic a constitué une première mondiale, consignée dans l’histoire de la maçonnerie comme la création de la première Grande Loge Féminine Autonome au monde. Non seulement elle répondait à une nécessité absolue, mais en plus, les femmes, qui appartenaient à cette Grande Loge, ont eu accès aux grades de perfectionnement. Au musée maçonnique de Râmnicu Vâlcea, on trouve un tablier maçonnique au nom de Smaranda Maltopol, qui faisait partie du Chapitre “l’Etoile du Danube”, et qui avait donc le grade 18.

Ceci démontre que, en Roumanie, les femmes ont eu plus de privilèges que leurs Sœurs dans le reste de l’Europe. Pour appuyer cette affirmation, il faut mentionner que, en 1927, les femmes roumaines ont obtenu le droit de vote aux élections locales, contrairement aux espagnoles qui l’ont eu en 1931 et aux françaises, en 1945.

La création de la Grande Loge Féminine Indépendante de Roumanie, événement marquant de l’époque, est mentionnée dans la publication “Paza” du 9 octobre 1923 et dans le rapport présenté au Convent Extraordinaire de l’Association Maçonnique Internationale en 1925. Des femmes d’exception de la société roumaine ont été membres de cette Grande Loge Féminine. Parmi elles, mentionnons Agepsina Macri Eftimiu, Bucura Dumbrava, Zoe Pallade, Smaranda Colonel Maltopol, Mariana Huch, Elena Rozer Prager, la dernière Grande Maîtresse Georgeta Davidescu, dernière Vénérable de la loge “l’Etoile d’Orient” de Bucarest et membre du Capitol “l’Etoile du Danube”. D’autres noms se trouvent dans le tableau publié en 1941 par Toma Petrescu dans la Conspiration des Loges et dans le volume, l’Ordre Maçonnique Roumain, publié par l’historien Horia Nitorescu Balcesti, à qui nous devons la majorité des documents qui prouvent l’existence en Roumanie de la première Grande Loge Féminine du monde.

En 1944, au moment de l’instauration du régime communiste, la Grande Loge Féminine s’est endormie en même temps que les autres Grandes Loges roumaines; beaucoup parmi ses membres prenant le chemin de l’exil. C’est seulement après le réveil général de la maçonnerie roumaine à la suite de la révolution de 1989 que les survivantes de l’époque, aidées par des maçonnes initiées par la Grande Loge Féminine de France, se réorganisent en 2000 et reconstituent, d’abord, la loge “l’Etoile d’Orient” fondée en 1922, ensuite, “l’Etoile du Sud” fondée en 1883, puis “l’Etoile du Danube”. Ainsi réapparaît la maçonnerie féminine en Roumanie, créée en 1922 sous le nom de Grande Loge Féminine d’Adoption Indépendante, qui va changer son nom en 2000 et adopter celui qu’elle porte aujourd’hui, Grande Loge Féminine de Roumanie.

La Grande Loge Féminine de Roumanie est aujourd’hui, comme elle l’était d’ailleurs dans le passé, une association légalement constituée et un pouvoir maçonnique national. Elle est indépendante et souveraine et pratique le Rite Ecossais Antique et Accepté. Huit ans après le rallumage de la maçonnerie féminine en Roumanie, la Grande Loge Féminine de Roumanie fait partie de l’Union Maçonnique Méditerranéenne, de la Chaîne Internationale Maçonnique CLIPSAS et elle est membre fondateur de l’association Espace Maçonnique Européen qui a son siège à Bruxelles. Elle entretient des relations et collabore avec de nombreuses Grandes Loges à travers le monde avec lesquelles elle a signé des traités d’amitié. Cette remémoration historique est indispensable à la connaissance des grands moments que le Rite Ecossais Antique et Accepté a traversé en Roumanie, qui ne fait rien d’autre que perpétuer une tradition de bientôt un siècle.